L’émotion compose depuis une décade une variable considérée comme prioritaire pour anticiper les attitudes et comportements des futurs utilisateurs et usagers face à des innovations. Derrière ce terme se cachent trop souvent des dimensions très différentes et, malgré un postulat implicite, il apparaît réducteur de penser qu’il suffit d’induire des émotions agréables pour susciter une acceptabilité renforcée. Plusieurs chercheurs ont ainsi critiqué l’approche émotionnelle bivalente (plaisir vs déplaisir), car trop simpliste pour expliquer les relations que nous entretenons avec les produits et les systèmes techniques. Le rôle même des émotions peut aussi être mis en cause. La première critique tient à l’état actuel de la recherche sur les émotions elles-mêmes, et à la diversité des approches théoriques et méthodologiques utilisées pour les identifier et rendre compte de leurs composantes. La deuxième critique vient du fait que l’émotion joue sans doute un rôle important dans l’interaction avec les produits et les systèmes techniques, mais on ne peut pas réduire cette interaction aux seuls phénomènes affectifs et oublier le rôle que jouent le contexte et l’expérience de l’individu sur les réactions affectives. Il est aussi complexe de séparer l’émotion des autres qualités des produits comme l’efficience, la sécurité ou la fiabilité. On peut aussi apporter une critique encore plus radicale compte tenu du caractère éphémère des émotions et remettre en cause leur utilité lors de la conception des produits, sauf pour les produits destinés exclusivement à un usage ludique. Malgré ces critiques, les approches qui envisagent la conception des produits du point de vue de leurs propriétés esthétiques, du plaisir qu’ils procurent ou des réactions émotionnelles qu’ils suscitent, introduisent d’ores et déjà des changements importants dans la manière d’envisager les interactions utilisateur / innovation. Michel Dubois tente de faire le point sur ces différents aspects et de montrer au-delà de certains apports de la variable émotionnelle, toute la complexité de cette variable.
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- Marie Juliana Peroz-Jacob
- April 7, 2015, midnight
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