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Venezuela. La crise de la « révolution bolivarienne » et l’épuisement du modèle rentier

16 juin 2017
Durée : 00:52:17
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Après une décennie des années 70 marquée par de sanglantes dictatures (et/ou des guerres civiles), des années 80 et 90 par les plans d’ajustements néolibéraux, l’Amérique latine a connu, depuis 1998, l’arrivée de gouvernements « progressistes » à la tête des Etats, notamment au sud du continent. Ce nouveau cycle politique est le fruit combiné d’une crise d’hégémonie des élites et partis traditionnels, et de la montée en puissance de diverses révoltes collectives, telles le Caracazo vénézuélien ou le zapatisme mexicain, des oppositions puissantes à des privatisations de l’eau et du gaz en Bolivie, mais aussi au Brésil ou au Costa Rica avec des mobilisations paysannes massives. Ceci alors que plusieurs chefs d’Etat ont été balayés par la rue au Pérou, en Equateur, en Bolivie et en Argentine, signant ainsi le retour de la question sociale dans le champ politique et la fin du « consensus de Washington ». Si on a pu parler de « tournant à gauche », ces gouvernements progressistes n’ont toutefois pas -ou peu- d’homogénéité. D’ailleurs, journalistes et chercheurs ont souvent opposé « deux gauches » latino-américaines : l’une aux accents anti-impérialistes, refondant les Constitutions, marquant le retour de l’Etat et sa défiance envers l’économie de marché ; l’autre s’adaptant aux institutions et préférant une attitude consensuelle envers les élites et le capital transnational. Plus d’une décennie et demie après l’élection de Hugo Chávez, il paraît préférable d’évoquer une multiplicité de contextes nationaux, traversés par un même mécontentement citoyen et un souci de répondre à l’urgence sociale de la part de gouvernements « nationalistes-populaires » et souvent qualifiés de « postnéolibéraux » (Sader, 2008 ; Katz, 2008). Indéniablement, la « vague » de gouvernements progressistes en Amérique du sud suscite l’intérêt des politistes et de la communauté scientifique depuis plusieurs années. Ainsi en France, plusieurs ouvrages se sont inscrits dans une tentative de compréhension de ce phénomène : avec un certain enthousiasme (Gaudichaud, 2008), de manière plus réservée (Saint-Upéry, 2008) ou pour souligner les tentations autoritaires (Dabène, 2008). Un certain nombre de dossiers de revues ont été également publiées sur le sujet (Actuel Marx, 2007 ; Problèmes d’Amérique latine, 2009). Cet intérêt est aussi bien réel au sein des universités latino-américaines (Nueva Sociedad, 2008). Néanmoins, depuis 4 ou 5 ans, les incertitudes s’amoncellent autour de ces exécutifs se réclamant du progressisme. Deux d’entre eux ont été renversés par des coups d’Etat (au Honduras en 2009 et au Paraguay en 2012), plusieurs affrontent désormais des mouvements sociaux aux répertoires d’actions différents (grève générale en Bolivie ou en Argentine, résistances socio-environnementales au Pérou, révoltes urbaines au Brésil, manifestations des couches moyennes supérieures au Venezuela…). Cette crise a pris une intensité supérieure ces derniers mois avec la victoire de Mauricio Macri aux élections présidentielles argentines, la défaite du chavisme aux élections législatives vénézuéliennes et celle d’Evo Morales au référendum sur la réélection du binôme présidentiel et la crise économique et politique que connaît le Brésil. Sur le plan économique, l’absence d’alternatives concrètes au modèle rentier ou primo-exportateur, à la « reprimarisation » des cycles productifs (Salama, 2012) ou encore aux processus néo-extractivistes de ressources naturelles, est de plus en plus au centre des critiques de la société civile et des oppositions politiques. Cette nouvelle conjoncture -et ses nombreuses inconnues- est partiellement décelable dans la littérature récente. Si certains auteurs, dans une perspective marxiste (Herrera, 2010) ou fonctionnaliste (Couffignal, 2013), décèlent avant tout une « nouvelle » Amérique latine, « révolutionnaire » et « laboratoire démocratique de l’Occident », d’autres auteurs (Dabène, 2012 ; Gaudichaud, 2016) ou revues (Recherches internationales, 2012 et 2016; Mouvements, 2013) mettent en lumière, sous divers éclairages, les difficultés, contradictions et limites des gouvernements en place (CEPAL, 2010). Au-delà des frontières de l’Hexagone, cette situation politique intéresse la communauté anglo-saxonne, dans une perspective critique centrée sur les impacts de la mondialisation du capital dans la région (Robinson, 2008 ; Webber, 2016). En Amérique latine, les chercheurs invitent à approfondir cette question face à des gouvernements « à la croisée des chemins » et qui font difficilement face à de nouveaux acteurs hégémoniques, telles que les firmes transnationales et la Chine ou encore vis-à-vis des dynamiques de prédation extractivistes, issues du « consensus des commodities » (Svampa, 2012 ; Nueva Sociedad, 2014). Assistons-nous ainsi à la fin d’un « âge d’or » des gouvernements progressistes sud et latino-américains ? Voire même à diverses formes et au développement de « révolutions passives » (Modenesi, 2012) ? Comment expliquer cet essoufflement ? Et avec quelles perspectives, alors que la configuration politique évolue dans plusieurs pays clefs ? Quelle est la place des mouvements sociaux dans ce contexte en tension ? Un tel colloque international centré sur l’Amérique du sud aura l’avantage de pouvoir mobiliser un public de chercheurs aussi bien français qu’étranger, et de renouveler notre approche, à plus de 15 ans du « tournant à gauche » dans la région. Il reste également ouvert à des éclairages centraméricains (cas du Nicaragua de Ortega et Murillo) et caribéens (notamment quant à l’impact et évolution des relations entre Cuba et les divers gouvernements progressistes).

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